jeudi 5 avril 2012

Impressions d'un ancien compagnon de la Marche vers Bruxelles depuis la Place Syntagma, hier après le suicide d'un retraité en face du parlement. (fr - esp)


La situation en Grèce est imprévisible, on me l'a déja dit. Un retraité s'est tiré une balle hier, place Syntagma, en face du parlement. À 18 heures, un petit groupe de personnes s'est approché de l'arbre où le suicide avait eu lieu, et a commencé à laisser des bougies et des messages de soutien et de colère. « Ce n'est pas le suicide, c'est un assassinat politique », déclarait l'un d'eux. À 21 heures, il étaient de milliers de gens à se rapprocher du Parlement, dessinant sur le sol avec les bougies, des flèches pointant le gouvernement. Les plus anciens faisaient face verbalement, bombant le torse, à un pas des policiers gardant le parlement. Les plus jeunes qui se tenaient un peu plus loin couverts de cagoules et de foulards, ont jeté pierres, oranges, et cocktails molotov. La police a commencé à tirer du gaz lacrymogène et aussi quelques pierres. Tous se sont mis à courir, sauf quelques-uns qui ont commencé à se lier avec ses bras et à dire qu'ils ne partiraient pas d'ici. Cela a fonctionné et petit à petit la foule est revenue, mais la guerre est repartie de plus belle avec cette fois ci une dispersion générale. La plupart couraient dans les rues latérales, nous autres sommes restés à côté de l'arbre, où des bougies et des messages continuaient à être déposés, cernés par le gaz, le feu et les blessés ... Dans un coin de la place s'est improvisé un poste de secours de fortune. Quelques médecins n'ont pu aider une jeune fille blessée. Comme des chats jouant avec une souris, sans raison la police a formé un cercle autour d'elle pour tenir à l'écart toute personne qui souhaitait l'aider: du pur sadisme! L'arbre était un îlot de silence où venaient, de temps à autre, des naufragés criant de rage pour ensuite se relancer dans la bataille. Beaucoup disaient : « C'est toujours comme ça ». Peu de personnes croyaient que c'était un nouveau départ. Le groupe s'est positionné devant la blessée, pour ne pas connaître une déception de plus. Ils avaient vu tant de choses en trois ans quand il semblait que tout allait changer. Et quand le changement venait, c'était toujours pire. « C'est toujours comme ça », mais presque tous étaient de retour ici sur la place Syntagma, après tout ce temps, et parfois on pouvait voir une petite lueur d'émotion dans leur yeux.


« Qui sera la prochaine victime? » disait un des messages suspendu à l'arbre. Ce n'est pas une simple phrase de rhétorique: en seulement trois ans, le taux de suicide en Grèce est passé du plus bas au plus élevé en Europe. La première chose qu'ont entendu des amis espagnols lors de leur arrivée à Athènes étaient les cris d'un couple qui menaçait de sauter par la fenêtre si le gouvernement ne négociait pas avec eux sa dette. Un jour, j'ai demandé à une femme qui aidait à servir dans une soupe populaire: « allez-vous continuer à faire ceci longtemps? » Et sa réponse fut: « tant que nous pouvons. Regarde cette petite ligne (elle montra alors une corde qui reliait plusieurs arbres et délimitait l'espace en un carré approximatif) Nous ne savons pas quand nous allons la franchir. Aujourd'hui nous sommes dedans, distribuant de la nourriture. Demain, on sera peut être dehors ». Émue elle s'est mise à pleurer. Et elle a demandé pardon se sentant un peu bête, mais a ajouté: «Les gens doivent apprendre que ce n'est pas un problème de la Grèce. C'est le problème de tous. Nous faisons tous partie du problème, nous devons tous faire partie de la solution. J'espère qu'un jour nous nous rendrons compte.... »

La veillée autour de l'arbre a continué toute la nuit. Dans la poche du retraité il y avait une lettre. On peut y lire:


« Le gouvernement Tsolakoglou a anéanti toutes mes possibilités de survie, qui étaient basées sur une pension très honorable que j’ai payé seul pendant 35 ans sans aucune aide de l’état. Et comme mon âge avancé ne me permet pas de réagir d’une façon dynamique (quoique si un compatriote grec devait se saisir d’une Kalashnikov, je m’empresserais de le suivre), je ne vois pas d’autre solution que de mettre fin à ma vie dignement, ce qui m’épargne d’avoir à fouiller les poubelles pour assurer ma survie. Je crois que les jeunes sans avenir vont prendre les armes un jour et ils pendront les traîtres de ce pays sur la Place Syntagma, exactement comme les Italiens l’ont fait pour Mussolini en 1945 ».


*En faisant référence à George Tsolakoglou, le Premier ministre qui collaborait avec les Allemands durant l’occupation allemande de la seconde guerre mondiale, il le compare au gouvernement de Lukas Papademos.

traduit depuis http://saltandoalapatacoja.blogspot.fr/

[esp]

La situación en Grecia es imprevisible, ya me lo habían dicho. Un jubilado se pegó un tiro ayer en Syntagma, en frente del parlamento. A las 6 de la tarde, un pequeño grupo de personas se acercaba al árbol donde se había producido el suicidio, y empezaron a dejar velas, mensajes de apoyo y de denuncia. "No es un suicidio, es un asesinato político" decía uno de ellos. A las 9 de la noche, ya eran miles de personas las que se acercaban al parlamento, dibujaban flechas con las velas en el suelo apuntando al gobierno; los más viejos se enfrentaban verbalmente, a pecho descubierto, sin armas y a un palmo de la cara de los policías que protegían el parlamento; los más jóvenes se ponían bastante más lejos y, tapados con capuchas y pañuelos; tiraban piedras, naranjas, cócteles molotov. La policía empezó a lanzar gases lacrimógenos y también algunas piedras; todos se echaron a correr, menos unos pocos que empezaron a entrelazarse con los brazos y a decir que no se iban de allí. La cosa funcionó y, poco a poco, fueron volviendo los demás; pero empezó de nuevo la guerra y esta vez hubo dispersión general. La mayoría salió corriendo por las calles adyacentes, otros nos quedamos al lado de aquel árbol, donde se seguían poniendo velas y mensajes, rodeados de gases, fuego, heridos... En un rincón de la plaza se había improvisado un pequeño puesto de ayuda sanitaria, y algunos de los médicos fueron a ayudar a una chica que estaba herida, pero la policía hizo un círculo alrededor de ella para que no entrara nadie a ayudarla. Sin ninguna razón, como los gatos que juegan con un pequeño ratón: puro sadismo. El árbol era una isla de silencio a la que llegaban, de vez en cuando, náufragos que gritaban de rabia y después volvían a lanzarse a la batalla. Esto es lo de siempre, decían muchos. Pocos creían que fuera el principio de algo más. Se ponían la venda antes de la herida, por no sufrir una decepción más. Habían visto tantas cosas en tres años, cuando parecía que todo iba a cambiar. Y cuando ha cambiado, ha sido siempre para mal. Es lo de siempre, decían, pero casi todos volvían a estar aquí, en Syntagma, después de tanto tiempo, y se le veía a veces un pequeño brillo de emoción en los ojos.

"¿Quién será la próxima víctima?", decía otro de los mensajes colgados del árbol. No es una frase retórica: en solo tres años, la tasa de suicidios en Grecia ha pasado de ser la más baja a la más alta de Europa. Lo primero que escucharon unos amigos españoles al llegar a Atenas fueron los gritos de una pareja que amenazaba con tirarse por la ventana si el gobierno no negociaba con ellos su deuda. Un día pregunté a una mujer que ayudaba a servir en una cocina popular: ¿y vais a seguir haciendo esto así durante mucho tiempo? Y su respuesta fue: "Hasta que podamos. Ves esta pequeña línea (señaló una cuerda que unía varios árboles hasta hacer un cuadrilátero). No sabemos cuándo la vamos a pasar. Ahora estamos dentro, repartiendo comida. Mañana, tal vez estemos fuera." Y se emociono y lloro. Y pidió perdón por ser tan tonta. Pero remató: "La gente tiene que enterarse de que no es un problema de Grecia. Es un problema de todos. Todos somos parte del problema, todos debemos ser parte de la solución. Espero que algún día nos demos cuenta".

La vigilia alrededor del árbol siguió durante la noche. En el bolsillo del jubilado había una carta escrita por él. Decía así:


"El Gobierno de Tsolakoglou* ha aniquilado toda posibilidad de supervivencia para mí, que se basaba en una pensión muy digna que yo había pagado por mi cuenta sin ninguna ayuda del Estado durante 35 años. Y dado que mi avanzada edad no me permite reaccionar de otra forma (aunque si un compatriota griego cogiera un kalashnikov, yo le apoyaría) no veo otra solución que poner fin a mi vida de esta forma digna para no tener que terminar hurgando en los contenedores de basura para poder subsistir. Creo que los jóvenes sin futuro cogerán algún día las armas y colgarán boca abajo a los traidores de este país en la plaza Syntagma, como los italianos hicieron con Mussollini en 1945".


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* Al nombrarlo así, relaciona el gobierno de hoy en día con el gobierno impuesto por los alemanes tras la ocupación de Grecia por los nazis en la segunda guerra mundial.

traducido desde http://saltandoalapatacoja.blogspot.fr/

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